Côte d’Ivoire : Un potentat ou une République ?

Rédigé par Frat/Mat le Lundi 23 Novembre 2020 à 13:05 | Lu 118 fois


Sans doute pour venir en soutien au président Alassane Ouattara, qui a dit une chose la veille et son contraire le lendemain, Kobenan Adjoumani, cadre du RHDP a candidement prononcé des paroles d’une rare gravité, en raison notamment de leurs implications pour son mentor et sur le fonctionnement de l’Etat de Côte d’Ivoire.


En effet, il y a quelque temps, se prononçant sur la réforme sine die de la commission électorale indépendante (CEI) annoncée par le chef de l’Etat lui-même comme devant survenir « avant les prochaines élections », Kobenan Adjoumani a déclaré, sans sourciller, que « le président Henri Konan Bédié sait très bien, concernant la révision de la CEI, ce que le président de la République et lui ont convenu lors de leur rencontre. Tous les deux savent très bien que la révision de la CEI concerne les élections présidentielles de 2020… »(Frat/Mat no du 13 septembre 2018).

A la lecture de ses lignes, la toute première remarque que l’on peut faire et qui fait froid dans le dos de tous qui sont nourris à la sève de la démocratie occidentale, c’est la candeur infantile qui s’échappe des propos du « jésus de Tanda » présentant son point de vue comme une vérité cardinale que seuls « les gens de mauvaise foi » refusent de voir. En clair, Kobenan Adjoumani écrit qu’en dépit de la promesse solennelle de réformer la CEI « avant les prochaines élections » faite par le chef de l’Etat, le 6 août devant toute la Nation, les présidents de parti, Henri Konan Bédié (PDCI) et Alassane Ouattara (RHDP) ont, 48 heures plus tard,  en privé, convenu que cette réforme de la CEI ne se fera pas « avant les prochaines élections » mais plutôt « avant les prochaines élections présidentielles de 2020 ».

En d’autres termes, le politicien du Zanzan sous-entend qu’il ne faut pas prendre au pied de la lettre les discours, mêmes officiels, de son patron. De là à dire que  ce dernier est un bonimenteur, il n’y a qu’un pas que le président du mouvement politique  « sur les traces d’Houphouët-Boigny » et membre fondateur du RHDP n’a pas osé franchir. Mais, c’est tout comme. Puisque  d’après ces propos-là, ce qui compte vraiment pour la Côte d’Ivoire, ce sont les accords passés en privé entre Bédié et Ouattara. Même si cela prend le contre-pied de ce qui a été publiquement promis.

Dans le fond, même si on fait l’économie de toutes les autres implications pour le fonctionnement de l’Etat contenues dans les propos de Kobenan Adjoumani, il reste que son discours nous apprend  que l’on vit sous le règne d’une sorte de potentat en Côte d’Ivoire. Le suzerain fait et défait à l’envie. Loin des règles de gestion d’une république démocratique. A la grande et curieuse indifférence des populations ivoiriennes qui ne semblent pas encore avoir intégré le sens des mots « république et démocratie ». Résultat, la majorité vit encore dans la précarité de la féodalité ancestrale drapée, enveloppée dans un carcan de république. Cela fait le bonheur des prédateurs ivoiriens qui s’en délectent sans modération.
Bamba Franck Mamadou

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