Pascal Affi N’Guessan, président du FPI - Le Point Afrique
Ex-compagnon de route de Laurent Gbagbo dont il a notamment été le premier ministre d’octobre 2000 à mars 2003, Pascal Affi N’Guessan préside actuellement le Front populaire ivoirien, une responsabilité conquise de haute lutte et devant la justice, d’abord en décembre 2014 quand la justice ivoirienne a invalidé la candidature de Laurent Gbagbo à l'élection présidentielle de 2015, à la suite d'une plainte déposée par Pascal Affi N’Guessan, ensuite en avril 2015 quand la même justice ivoirienne l’a confirmé dans sa fonction de président du FPI tout en interdisant à Aboudramane Sangaré et ses soutiens (Simone et Michel Gbagbo entre autres) d'utiliser le nom et le logotype du parti. Arrivé deuxième avec 9,2 % des voix derrière le président Ouattara à la présidentielle du 25 octobre 2015, il s’est porté candidat à l’élection présidentielle suivante du 31 octobre 2020 où il a milité dans le camp favorable au boycott porté par l’éphémère Conseil national de transition qui souhaitait « un retour à la légalité constitutionnelle » et l’« organisation d'élections justes, transparentes et inclusives ». Porte-parole de ce même CNT présidé par Henri Konan-Bédié, leader du PDCI, Pascal Affi N’Guessan est arrêté le 7 novembre 2020 sous l’accusation de « complot contre l'autorité de l’État », « mouvement insurrectionnel », « assassinat » et « actes de terrorisme ». Remis en liberté provisoire le 30 décembre, il s’est replongé dans la vie de son parti.
Entretemps, l’ex-président de la République, Laurent Gbagbo, définitivement acquitté par la Cour pénale internationale (CPI), est rentré en Côte d’Ivoire le 17 juin, après dix ans d’absence. Une question essentielle s’est posée : que va faire Laurent Gbagbo avec le FPI légal de Pascal Affi N’Guessan alors que ses fidèles du FPI-GOR (Gbagbo ou rien) ont toujours refusé d’abandonner un bateau qu’ils considéraient leur ? Réponse a été donnée le week-end du 17 octobre avec la fondation d’un nouvelle formation politique, le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), qui l’a porté à sa tête. « C’est toujours une déchirure quand on est on est obligé de recommencer », a dit Laurent Gbagbo dans l’entretien qu’il a accordé à France 24 le 19 octobre. « A mon retour, a-t-il ajouté, je n’ai pas reconnu le parti ». Et de poursuivre : « Les temps ont changé, les circonstances aussi » avant d’embrayer sur le sujet du panafricanisme et de faire allusion à l’un de ses chantres, Kwamé Nkrumah. « Il a mis ses idées sur la place publique, je les adopte », a-t-il dit.
Alors que cette nouvelle donne, qui en a surpris plus d’un, s’installe dans le paysage politique ivoirien, Pascal Affi N’Guessan s’est confié au Point Afrique. Pas seulement pour parler du FPI mais aussi pour exposer la feuille de route qui lui paraît la meilleure pour la Côte d’Ivoire. Y passent pêle-mêle les Etats généraux de la République, son regard sur la nation ivoirienne, sa conception d’un État refondé sur de nouvelles bases et bien sûr sa vision de la Côte d’Ivoire idéale.
Le Point Afrique : L'actualité politique ivoirienne est très dense en ce moment avec notamment la création par Laurent Gabgbo du Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire. Quel est votre sentiment sur cette création ?
Pascal Affi Nguessan : Aucun sentiment particulier, c'est un parti politique supplémentaire qui voit le jour sur l'échiquier politique ivoirien. Tout ce que nous espérons, c’est qu'il vienne contribuer à l’apaisement, au renforcement de la démocratie et à la stabilité politique du pays
Le Point Afrique : Vous attendiez-vous à ce que Laurent Gbagbo crée un autre parti à côté du Front populaire ivoirien ?
Pascal Affi Nguessan : Je ne fais pas de spéculation sur les intentions des leaders politiques, je prends acte des actes qu’ils posent.
Le Point Afrique : Quelles sont les perspectives actuelles du Front populaire ivoirien au regard de l’évolution de la situation ?
Pascal Affi Nguessan : Les perspectives du FPI restent les mêmes. C’est la reconquête du pouvoir d’État, notamment à l'occasion des élections de 2025. Pour cela, il faut s'organiser, reconstruire le parti sur l'ensemble du territoire, actualiser son projet politique par rapport aux problématiques nouvelles auxquelles le pays est confronté, à savoir celle de la réconciliation et de l'unité nationale, de la lutte contre la corruption et la pauvreté, pour la bonne gouvernance, la promotion des femmes, la lutte contre les inégalités sociales, l’amélioration de pouvoir d'achat et des revenus, notamment du monde rural, la reconstruction de l’école et d’un système sanitaire qui nous éviterait ces incessants voyages entre Abidjan et Paris pour des raisons de santé.
Nous devons aussi rester engagés dans la vie quotidienne des Ivoiriens en terme de contrôle de l'action gouvernementale pour être le porte-voix des populations par rapport à la manière dont le pays est gouverné. Il s’agit donc pour nous d’être présent dans l’actualité politique. C’est ce travail-là que nous continuons, en espérant que d’ici 2025, nous aurons convaincu les Ivoiriens de notre aptitude à revenir au pouvoir, de ce que nous avons l'homme qu'il faut pour être à la tête de l'État de Côte d'Ivoire afin de tourner la page de ces 30 ans de violences, de palabres, de pleurs....
Le Point Afrique : Quelle est la matrice idéologique de FPI qui va nourrir votre projet et votre action ?
Pascal Affi Nguessan : Notre ancrage idéologique, c'est la social-démocratie. Autrement dit, une idéologie du partage, de la liberté d'expression, de l’initiative, de commerce et d’industrie. C’est aussi une idéologie de la juste répartition des fruits de la croissance afin de ne pas laisser sur le bord de la route les couches défavorisées. Nous sommes pour une société d’équilibre qui refuse les inégalités scandaleuses sources d'instabilité politiques, de violence et de crise. Nous sommes pour la liberté et la démocratie, la solidarité et l'unité nationales parce que nous sommes une nation en construction. Notre volonté, c'est de construire la cohésion de la nation ivoirienne de manière à ce que les Ivoiriens se considèrent comme frères et sœurs, engagés dans le même projet politique en ayant un destin commun. Qu’ils se serrent les coudes, travaillent la main dans la main pour faire face à toutes les difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés.
Nous souhaitons aussi une Côte d'Ivoire qui pourrait être le moteur même de l'intégration ouest-africaine parce qu’il y a aujourd'hui des problématiques qui exigent une mutualisation des moyens, une convergence des actions. Pour cela, il faut que nous travaillons davantage à consolider la Communauté économique des États de l'Afrique de l’Ouest (Cedeao), à créer un grand marché ouest-africain avec plus de 500 millions d'habitants, à créer une monnaie commune, un marché commun, ce qui permettrait à toutes les entreprises de mieux se déployer parce qu’elles auraient accès à un marché plus large. Au-delà, il s’agit de constituer une union africaine. Voilà un certain nombre de directions qui constituent le soubassement de notre doctrine politique.
Le Point Afrique : Quels sont les leviers politiques sur lesquels vous souhaitez vous appuyer pour rendre votre projet cohérent, vos futures actions efficaces et apaisantes dans la construction de la nation ivoirienne ?
Pascal Affi Nguessan : Demain à la tête de la Côte d'Ivoire, la première urgence sera la réconciliation nationale. Il le faut pour créer les conditions du développement et apaiser les cœurs. Pour cela, j’ai proposé dès 2013 l'organisation d’États généraux de la République qui permettraient de résoudre plusieurs problèmes :
Un premier d’ordre mémoriel : faire la vérité sur tout ce qui s'est passé, permettre à tous de s’exprimer et aux victimes de dire leurs souffrances. C’est fondamental parce que l’État pourra alors prendre les mesures de réparation nécessaires au niveau individuel et collectif, sur le registre matériel mais aussi symbolique. Nous avons cette obligation d’emprunter ce chemin parce qu’il est celui de la restauration de la cohésion nationale, parce qu’il permettra de prendre les décisions d’ordre législatif, réglementaire, économique, politique qui vont refonder l’État de Côte d’Ivoire autour d’un nouveau contrat social à même de mieux rebâtir les institutions. Aujourd’hui, les Ivoiriens doivent s’asseoir autour d'une même table pour dire quel type d’État ils veulent et comment ils veulent que l'État soit organisé pour mieux prendre en compte leurs aspirations et leurs préoccupations. Ainsi répondre à des questions comme « Comment la richesse doit être répartie ? », « Quelle place accorder à la décentralisation ? », « Quelle place accorder au secteur privé, aux structures de mutualisation d'économie sociale et solidaire ? », etc. Parti social-démocrate, nous sommes très attachés à cette forme d'organisation économique qui responsabilise les hommes partout où ils se trouvent et quelque soit la taille de leur activité économique.
Ensuite, nous devons aussi réfléchir à la transformation de notre économie. Parce qu'un pays développé, c’est d’abord un pays industrialisé. Nous ne pouvons pas ambitionner d’être une grande nation si nous restons scotchés à l’économie agricole, à l'économie des plantations héritée de la colonisation. Il faut passer à l’aire de l’industrialisation en transformant notre production agricole et nos produits miniers, en jouant aussi sur un parc important de petites et moyennes entreprises qui permettraient aux initiatives ivoiriennes de pouvoir s’épanouir avec le soutien de l’État. En la matière, il convient de mettre en place un fonds souverain à même de financer les investissements structurants et l'émergence de champions nationaux parce que si l’investissement direct étranger est une chose souhaitable, il faut encourager les Ivoiriens qui doivent d'abord être les acteurs de leur propre développement.
Au niveau social, il y a une question fondamentale, celle du capital humain. On peut dire que la crise en Côte d'Ivoire est d'abord la crise du capitalisme parce que l'analphabétisme est très important, le système scolaire est en faillite, le pays ne dispose pas des compétences et de la culture qui permettraient de sortir des logiques d'affrontements. Il faut donc mettre un accent particulier sur le capital humain en termes de révolution culturelle aussi. Nous devons sortir de la mentalité du sous-développement, de la logique d’assistance, de tous les comportements contraires aux règles de la transformation économique et du développement économique pour promouvoir de nouvelles façons de réfléchir, d’agir et de travailler qui soient la source du progrès économique et social.
Pour aller plus loin, nous devons adapter notre système éducatif à nos besoins, notamment économiques. Que constate-t-on aujourd’hui ? Alors qu’il y a une forte demande en main d’œuvre, il y a un chômage pratiquement endémique. Cela signifie qu’il y a une déconnexion entre l’éducation et les besoins de la société. Il faut donc amplifier l’éducation et faire en sorte que tous les jeunes Ivoiriens en âge d'aller à l'école puissent trouver une place dans le primaire, que tous ceux qui peuvent entrer à l’université puissent le faire et que l’école soit véritablement gratuite parce que c’est la source de tous les progrès.
Sur le front de la santé, il faut se mettre au travail pour avoir un système de santé de référence lui-même source de capital humain de qualité.
Pour ce qui concerne la diplomatie, il convient de repositionner la Côte d’Ivoire et lui redonner son lustre d’antan autant au niveau de la sous-région comme plaque tournante de l'activité politique économique et sociale qu’au niveau mondial sur des problématiques de paix, de lutte contre le terrorisme et le réchauffement climatique, des questions aujourd'hui à l'ordre du jour sur l’échiquier diplomatique mondial.
Et puis, en ce qui concerne le développement durable, notre pays doit devenir une référence en changeant de logique dans la construction de nos villes et dans la consommation des ressources énergétiques.
Voilà en ce qui concerne notre programme. C'est ce que nous avons déjà proposé en 2020. Nous allons continuer à l’actualiser et l'adapter à l'évolution des choses pour mieux le proposer en 2025.
Pascal Affi Nguessan : Les perspectives du FPI restent les mêmes. C’est la reconquête du pouvoir d’État, notamment à l'occasion des élections de 2025. Pour cela, il faut s'organiser, reconstruire le parti sur l'ensemble du territoire, actualiser son projet politique par rapport aux problématiques nouvelles auxquelles le pays est confronté, à savoir celle de la réconciliation et de l'unité nationale, de la lutte contre la corruption et la pauvreté, pour la bonne gouvernance, la promotion des femmes, la lutte contre les inégalités sociales, l’amélioration de pouvoir d'achat et des revenus, notamment du monde rural, la reconstruction de l’école et d’un système sanitaire qui nous éviterait ces incessants voyages entre Abidjan et Paris pour des raisons de santé.
Nous devons aussi rester engagés dans la vie quotidienne des Ivoiriens en terme de contrôle de l'action gouvernementale pour être le porte-voix des populations par rapport à la manière dont le pays est gouverné. Il s’agit donc pour nous d’être présent dans l’actualité politique. C’est ce travail-là que nous continuons, en espérant que d’ici 2025, nous aurons convaincu les Ivoiriens de notre aptitude à revenir au pouvoir, de ce que nous avons l'homme qu'il faut pour être à la tête de l'État de Côte d'Ivoire afin de tourner la page de ces 30 ans de violences, de palabres, de pleurs....
Le Point Afrique : Quelle est la matrice idéologique de FPI qui va nourrir votre projet et votre action ?
Pascal Affi Nguessan : Notre ancrage idéologique, c'est la social-démocratie. Autrement dit, une idéologie du partage, de la liberté d'expression, de l’initiative, de commerce et d’industrie. C’est aussi une idéologie de la juste répartition des fruits de la croissance afin de ne pas laisser sur le bord de la route les couches défavorisées. Nous sommes pour une société d’équilibre qui refuse les inégalités scandaleuses sources d'instabilité politiques, de violence et de crise. Nous sommes pour la liberté et la démocratie, la solidarité et l'unité nationales parce que nous sommes une nation en construction. Notre volonté, c'est de construire la cohésion de la nation ivoirienne de manière à ce que les Ivoiriens se considèrent comme frères et sœurs, engagés dans le même projet politique en ayant un destin commun. Qu’ils se serrent les coudes, travaillent la main dans la main pour faire face à toutes les difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés.
Nous souhaitons aussi une Côte d'Ivoire qui pourrait être le moteur même de l'intégration ouest-africaine parce qu’il y a aujourd'hui des problématiques qui exigent une mutualisation des moyens, une convergence des actions. Pour cela, il faut que nous travaillons davantage à consolider la Communauté économique des États de l'Afrique de l’Ouest (Cedeao), à créer un grand marché ouest-africain avec plus de 500 millions d'habitants, à créer une monnaie commune, un marché commun, ce qui permettrait à toutes les entreprises de mieux se déployer parce qu’elles auraient accès à un marché plus large. Au-delà, il s’agit de constituer une union africaine. Voilà un certain nombre de directions qui constituent le soubassement de notre doctrine politique.
Le Point Afrique : Quels sont les leviers politiques sur lesquels vous souhaitez vous appuyer pour rendre votre projet cohérent, vos futures actions efficaces et apaisantes dans la construction de la nation ivoirienne ?
Pascal Affi Nguessan : Demain à la tête de la Côte d'Ivoire, la première urgence sera la réconciliation nationale. Il le faut pour créer les conditions du développement et apaiser les cœurs. Pour cela, j’ai proposé dès 2013 l'organisation d’États généraux de la République qui permettraient de résoudre plusieurs problèmes :
Un premier d’ordre mémoriel : faire la vérité sur tout ce qui s'est passé, permettre à tous de s’exprimer et aux victimes de dire leurs souffrances. C’est fondamental parce que l’État pourra alors prendre les mesures de réparation nécessaires au niveau individuel et collectif, sur le registre matériel mais aussi symbolique. Nous avons cette obligation d’emprunter ce chemin parce qu’il est celui de la restauration de la cohésion nationale, parce qu’il permettra de prendre les décisions d’ordre législatif, réglementaire, économique, politique qui vont refonder l’État de Côte d’Ivoire autour d’un nouveau contrat social à même de mieux rebâtir les institutions. Aujourd’hui, les Ivoiriens doivent s’asseoir autour d'une même table pour dire quel type d’État ils veulent et comment ils veulent que l'État soit organisé pour mieux prendre en compte leurs aspirations et leurs préoccupations. Ainsi répondre à des questions comme « Comment la richesse doit être répartie ? », « Quelle place accorder à la décentralisation ? », « Quelle place accorder au secteur privé, aux structures de mutualisation d'économie sociale et solidaire ? », etc. Parti social-démocrate, nous sommes très attachés à cette forme d'organisation économique qui responsabilise les hommes partout où ils se trouvent et quelque soit la taille de leur activité économique.
Ensuite, nous devons aussi réfléchir à la transformation de notre économie. Parce qu'un pays développé, c’est d’abord un pays industrialisé. Nous ne pouvons pas ambitionner d’être une grande nation si nous restons scotchés à l’économie agricole, à l'économie des plantations héritée de la colonisation. Il faut passer à l’aire de l’industrialisation en transformant notre production agricole et nos produits miniers, en jouant aussi sur un parc important de petites et moyennes entreprises qui permettraient aux initiatives ivoiriennes de pouvoir s’épanouir avec le soutien de l’État. En la matière, il convient de mettre en place un fonds souverain à même de financer les investissements structurants et l'émergence de champions nationaux parce que si l’investissement direct étranger est une chose souhaitable, il faut encourager les Ivoiriens qui doivent d'abord être les acteurs de leur propre développement.
Au niveau social, il y a une question fondamentale, celle du capital humain. On peut dire que la crise en Côte d'Ivoire est d'abord la crise du capitalisme parce que l'analphabétisme est très important, le système scolaire est en faillite, le pays ne dispose pas des compétences et de la culture qui permettraient de sortir des logiques d'affrontements. Il faut donc mettre un accent particulier sur le capital humain en termes de révolution culturelle aussi. Nous devons sortir de la mentalité du sous-développement, de la logique d’assistance, de tous les comportements contraires aux règles de la transformation économique et du développement économique pour promouvoir de nouvelles façons de réfléchir, d’agir et de travailler qui soient la source du progrès économique et social.
Pour aller plus loin, nous devons adapter notre système éducatif à nos besoins, notamment économiques. Que constate-t-on aujourd’hui ? Alors qu’il y a une forte demande en main d’œuvre, il y a un chômage pratiquement endémique. Cela signifie qu’il y a une déconnexion entre l’éducation et les besoins de la société. Il faut donc amplifier l’éducation et faire en sorte que tous les jeunes Ivoiriens en âge d'aller à l'école puissent trouver une place dans le primaire, que tous ceux qui peuvent entrer à l’université puissent le faire et que l’école soit véritablement gratuite parce que c’est la source de tous les progrès.
Sur le front de la santé, il faut se mettre au travail pour avoir un système de santé de référence lui-même source de capital humain de qualité.
Pour ce qui concerne la diplomatie, il convient de repositionner la Côte d’Ivoire et lui redonner son lustre d’antan autant au niveau de la sous-région comme plaque tournante de l'activité politique économique et sociale qu’au niveau mondial sur des problématiques de paix, de lutte contre le terrorisme et le réchauffement climatique, des questions aujourd'hui à l'ordre du jour sur l’échiquier diplomatique mondial.
Et puis, en ce qui concerne le développement durable, notre pays doit devenir une référence en changeant de logique dans la construction de nos villes et dans la consommation des ressources énergétiques.
Voilà en ce qui concerne notre programme. C'est ce que nous avons déjà proposé en 2020. Nous allons continuer à l’actualiser et l'adapter à l'évolution des choses pour mieux le proposer en 2025.
Le Point Afrique : Dans l’histoire de la Côte d’Ivoire, les crises se sont souvent cristallisées autour de problèmes d’interprétation de tel ou tel article de la Constitution. Comment construire une Constitution, à laquelle tous les Ivoiriens vont adhérer une bonne fois pour toutes, et qui aura écarté ces écueils déjà identifiés ?
Pascal Affi Nguessan : La Constitution est la matrice du contrat social, c'est à dire de la volonté générale des Ivoiriens. Elle ne peut pas se mettre en place sans leur participation. C’est pour cela que je l’ai inscrite dans les États généraux de la République pour un dialogue national inclusif. Nous y proposerons d’ailleurs de passer à une autre République, la quatrième, avec, à la clef, la suppression d’un certain nombre d’institutions.
Le Point Afrique : Lesquelles ?
Pascal Affi Nguessan : Le Sénat par exemple ainsi que la Vice- présidence. Nous pensons que les deux ne sont pas nécessaires ensemble. Il faut faire un choix entre le système présidentiel et le système semi-présidentiel. On ne peut pas être dans un système où on a la fois un vice-président et un premier ministre.
Sinon, nous voulons accorder une très grande place à la régionalisation qui, de notre point de vue, doit être constitutionnalisée de manière à ce que soit clairement posée la répartition des compétences entre l'État central et les autres collectivités. Il s’agit de faire en sorte que les ressources nationales soient réparties d’une manière qui permette à chaque région de disposer d'un minimum pour faire face aux besoins élémentaires des populations pendant que l’État s’occupe de toutes les questions qui sont d’ordre national. Autrement dit, le principe de subsidiarité doit être appliqué de façon rigoureuse.
Au niveau du parlement, nous pensons qu’il faut associer la diaspora à l’action politique avec des élus qui vont permettre de capitaliser ce que la diaspora représente aujourd’hui pour les pays africains. Les chiffres, faut-il le rappeler, nous indiquent que nous avons plus d’un million d'Ivoiriens en France. À travers les échanges, ils contribuent au développement du pays et se préoccupent de l’avenir de la Côte d’Ivoire. Il faut donc leur donner la parole et les moyens de pouvoir peser sur les décisions qui se prennent en Côte d'Ivoire. Conséquemment, nous sommes donc favorables à ce que la diaspora soit représentée au parlement.
Voilà donc un certain nombre d’idées que nous souhaitons inscrire dans le dialogue national inclusif pour aboutir à une Constitution qui soit la traduction de notre histoire et de nos aspirations.
Le Point Afrique : Le mot le plus important que vous avez prononcé, c’est le mot inclusivité. La Côte d'Ivoire est un pays qui a des chefs coutumiers, des chefs traditionnels. Seront-ils autour de la table avec les autres ? Si oui comment va-t-on tenir compte des éléments locaux ?
Pascal Affi Nguessan : Nous pensons que le principe doit être de créer justement cette synergie entre les structures coutumières traditionnelles et les institutions modernes héritées de la colonisation. Cela permettra d’avoir un pays avec les pieds dans la tradition et la tête tournée vers le modernisme. Pour cela, les chefs coutumiers doivent avoir une place dans l’architecture institutionnelle de l’État, un rôle bien spécifié, des moyens qui leur soient affectés et des responsabilités auxquelles ils sont associés avec des moyens adaptés.
Aujourd'hui, on dit que le chef du village est l’auxiliaire de l’administration or, dans la réalité, on ne sait pas trop comment cerner cette mission d’auxiliaire. S’il avait une mission en matière d’état civil, il pourrait être formé pour tenir un registre d'état civil, celui des décès de manière à ce que le fichier électoral, par exemple, soit régulièrement mis à jour et épuré de tous les décès. Aujourd’hui, parce que ce maillon manque, aucun fichier ne reflète la réalité démographique du pays.
Actuellement, les villages sont intégrés aux communes, mais au regard de leur dispersion, les maires n’ont pas les moyens de tous les atteindre. Tout ça pour dire que le chef de village, avec les populations, peut aussi impulser une part du développement local. Pour cela, il faut un cadre juridique, un conseil reconnu par les règles, les lois, un conseil dans lequel siègent à la fois le chef et tous les acteurs locaux, les jeunes, les femmes, et parfois les cadres qui, tout en étant en ville, continuent de soutenir les actions du développement au village.
Tous ces acteurs doivent avoir une place dans les institutions pour pouvoir ensemble concevoir les projets de développement des villages et les mettre en œuvre. Il convient donc de bien étudier ce que l’État peut leur apporter comme appui financier. Des lois de la République doivent ainsi prendre en charge un certain nombre de missions de cette nature de manière à ce que, dans le fonctionnement général, tradition et institutions modernes s'associent pour faire avancer le pays.
Le Point Afrique : Quand on parle de démocratie, on pense nécessairement aux élections et au mode de scrutin. Comment pensez-vous agir sur le mode de scrutin et le rendre le plus inclusif possible ?
Pascal Affi Nguessan : Là aussi, il y a un besoin de refondation, d’inclusivité et de légitimité. Tout le monde doit être associé à la définition du cadre institutionnel à mettre en place. Pour nous, le mode de scrutin et le découpage des circonscriptions doivent aussi découler de l'organisation de l’État. Si nous choisissons la régionalisation, il faut que l'organisation électorale épouse ce contexte régional. Autrement dit, il faudra faire des régions les principales circonscriptions électorales avec des élus qui soient les élus de chaque région.
Le Point Afrique : Pourquoi s'arrêter seulement au niveau des régions ? N’y a-t-il pas d’autres niveaux qui fassent plus sens pour les populations ?
Pascal Affi Nguessan : A l’heure actuelle, on peut dire que c’est le village qui fait sens pour les populations mais ce niveau de sectorisation constitue une menace pour l’intégration nationale. Il ne faut pas que dans la volonté de pousser le plus loin possible, on sacrifie l'émergence du sentiment national. Donc, nous avons à trouver le bon compromis entre la volonté de prendre en compte les spécificités locales, les particularités des populations, et la nécessité de développer le sens de l'intérêt national et le sentiment d’appartenance à une même nation. Et si les intérêts nationaux sont en concurrence avec l'intérêt local, il faut savoir aviser au bénéfice de l'intérêt national.
Par ailleurs, en même temps que nous allons promouvoir le suffrage universel dans le cadre de l’élection du président de la République qui doit être véritablement l’incarnation de la nation ivoirienne, il faut, qu’en ce qui concerne le développement, nous laissions suffisamment d’attributions aux régions pour qu’elles-mêmes se prennent en charge avec les moyens de réaliser leur desiderata. De fait, il faut donner des compétences aux localités pour qu’elles s’auto-administrent à travers l’élection de conseillers régionaux et de maires par les populations elles-mêmes. Il n'y a pas de contradiction entre un mode de scrutin qui ferait de la région une circonscription pour les questions locales et de toute la nation une circonscription électorale pour ce qui concerne l’élection présidentielle.
Le Point Afrique : Ne sont-ce pas les atermoiements autour de cette question qui favorise finalement la corruption qui s'immisce dans les imperfections des institutions ?
Pascal Affi Nguessan : Non, la corruption, surtout au niveau électoral, est d’abord le fruit de la faiblesse de la maturité démocratique.
Le Point Afrique : C’est à dire ?
Pascal Affi Nguessan : La faiblesse de la maturité démocratique se concrétise par le fait qu’une bonne partie de la population n’a pas encore une conscience idéologique qui lui permette d’accorder d'abord de l’importance aux idées et aux programmes politiques plutôt qu’à un individu issu de son ethnie. C’est faute de cette prise de conscience qu’on peut sacrifier son avenir au profit de la satisfaction d’un besoin immédiat. La corruption est donc liée à la fois à l’ignorance mais aussi à la pauvreté extrême. Lorsqu'on est dans une situation de pauvreté extrême, on résiste difficilement à la tentation de prendre ce qui se présente à vous au détriment de l’avenir.
Le Point Afrique : Qu’est-ce que l'homme politique que vous êtes pense de la contradiction entre la dynamique d’intégration actuelle et le principe d l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation tel qu’érigé par l’ancêtre de l’Union africaine, l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) ?
Pascal Affi Nguessan : C'est une question qui est liée à l'histoire du monde. Le monde s'est construit dans un processus d'émergence des États-nations. Aujourd’hui, le monde est un monde d’États-nations
Cela ne se vérifie pas toujours. Dans certains cas, la nation est née au forceps et l'État n'est pas stable.
Oui, surtout en Afrique. Mais si nous regardons l’histoire d’un pays comme la France, on a commencé à construire la nation française autour de la Monarchie, d’abord une monarchie de droit divin. Celle-ci, plus tard, s'est détachée de Rome afin d'organiser sur son territoire sa religion, sa population et son développement.
Pascal Affi Nguessan : La Constitution est la matrice du contrat social, c'est à dire de la volonté générale des Ivoiriens. Elle ne peut pas se mettre en place sans leur participation. C’est pour cela que je l’ai inscrite dans les États généraux de la République pour un dialogue national inclusif. Nous y proposerons d’ailleurs de passer à une autre République, la quatrième, avec, à la clef, la suppression d’un certain nombre d’institutions.
Le Point Afrique : Lesquelles ?
Pascal Affi Nguessan : Le Sénat par exemple ainsi que la Vice- présidence. Nous pensons que les deux ne sont pas nécessaires ensemble. Il faut faire un choix entre le système présidentiel et le système semi-présidentiel. On ne peut pas être dans un système où on a la fois un vice-président et un premier ministre.
Sinon, nous voulons accorder une très grande place à la régionalisation qui, de notre point de vue, doit être constitutionnalisée de manière à ce que soit clairement posée la répartition des compétences entre l'État central et les autres collectivités. Il s’agit de faire en sorte que les ressources nationales soient réparties d’une manière qui permette à chaque région de disposer d'un minimum pour faire face aux besoins élémentaires des populations pendant que l’État s’occupe de toutes les questions qui sont d’ordre national. Autrement dit, le principe de subsidiarité doit être appliqué de façon rigoureuse.
Au niveau du parlement, nous pensons qu’il faut associer la diaspora à l’action politique avec des élus qui vont permettre de capitaliser ce que la diaspora représente aujourd’hui pour les pays africains. Les chiffres, faut-il le rappeler, nous indiquent que nous avons plus d’un million d'Ivoiriens en France. À travers les échanges, ils contribuent au développement du pays et se préoccupent de l’avenir de la Côte d’Ivoire. Il faut donc leur donner la parole et les moyens de pouvoir peser sur les décisions qui se prennent en Côte d'Ivoire. Conséquemment, nous sommes donc favorables à ce que la diaspora soit représentée au parlement.
Voilà donc un certain nombre d’idées que nous souhaitons inscrire dans le dialogue national inclusif pour aboutir à une Constitution qui soit la traduction de notre histoire et de nos aspirations.
Le Point Afrique : Le mot le plus important que vous avez prononcé, c’est le mot inclusivité. La Côte d'Ivoire est un pays qui a des chefs coutumiers, des chefs traditionnels. Seront-ils autour de la table avec les autres ? Si oui comment va-t-on tenir compte des éléments locaux ?
Pascal Affi Nguessan : Nous pensons que le principe doit être de créer justement cette synergie entre les structures coutumières traditionnelles et les institutions modernes héritées de la colonisation. Cela permettra d’avoir un pays avec les pieds dans la tradition et la tête tournée vers le modernisme. Pour cela, les chefs coutumiers doivent avoir une place dans l’architecture institutionnelle de l’État, un rôle bien spécifié, des moyens qui leur soient affectés et des responsabilités auxquelles ils sont associés avec des moyens adaptés.
Aujourd'hui, on dit que le chef du village est l’auxiliaire de l’administration or, dans la réalité, on ne sait pas trop comment cerner cette mission d’auxiliaire. S’il avait une mission en matière d’état civil, il pourrait être formé pour tenir un registre d'état civil, celui des décès de manière à ce que le fichier électoral, par exemple, soit régulièrement mis à jour et épuré de tous les décès. Aujourd’hui, parce que ce maillon manque, aucun fichier ne reflète la réalité démographique du pays.
Actuellement, les villages sont intégrés aux communes, mais au regard de leur dispersion, les maires n’ont pas les moyens de tous les atteindre. Tout ça pour dire que le chef de village, avec les populations, peut aussi impulser une part du développement local. Pour cela, il faut un cadre juridique, un conseil reconnu par les règles, les lois, un conseil dans lequel siègent à la fois le chef et tous les acteurs locaux, les jeunes, les femmes, et parfois les cadres qui, tout en étant en ville, continuent de soutenir les actions du développement au village.
Tous ces acteurs doivent avoir une place dans les institutions pour pouvoir ensemble concevoir les projets de développement des villages et les mettre en œuvre. Il convient donc de bien étudier ce que l’État peut leur apporter comme appui financier. Des lois de la République doivent ainsi prendre en charge un certain nombre de missions de cette nature de manière à ce que, dans le fonctionnement général, tradition et institutions modernes s'associent pour faire avancer le pays.
Le Point Afrique : Quand on parle de démocratie, on pense nécessairement aux élections et au mode de scrutin. Comment pensez-vous agir sur le mode de scrutin et le rendre le plus inclusif possible ?
Pascal Affi Nguessan : Là aussi, il y a un besoin de refondation, d’inclusivité et de légitimité. Tout le monde doit être associé à la définition du cadre institutionnel à mettre en place. Pour nous, le mode de scrutin et le découpage des circonscriptions doivent aussi découler de l'organisation de l’État. Si nous choisissons la régionalisation, il faut que l'organisation électorale épouse ce contexte régional. Autrement dit, il faudra faire des régions les principales circonscriptions électorales avec des élus qui soient les élus de chaque région.
Le Point Afrique : Pourquoi s'arrêter seulement au niveau des régions ? N’y a-t-il pas d’autres niveaux qui fassent plus sens pour les populations ?
Pascal Affi Nguessan : A l’heure actuelle, on peut dire que c’est le village qui fait sens pour les populations mais ce niveau de sectorisation constitue une menace pour l’intégration nationale. Il ne faut pas que dans la volonté de pousser le plus loin possible, on sacrifie l'émergence du sentiment national. Donc, nous avons à trouver le bon compromis entre la volonté de prendre en compte les spécificités locales, les particularités des populations, et la nécessité de développer le sens de l'intérêt national et le sentiment d’appartenance à une même nation. Et si les intérêts nationaux sont en concurrence avec l'intérêt local, il faut savoir aviser au bénéfice de l'intérêt national.
Par ailleurs, en même temps que nous allons promouvoir le suffrage universel dans le cadre de l’élection du président de la République qui doit être véritablement l’incarnation de la nation ivoirienne, il faut, qu’en ce qui concerne le développement, nous laissions suffisamment d’attributions aux régions pour qu’elles-mêmes se prennent en charge avec les moyens de réaliser leur desiderata. De fait, il faut donner des compétences aux localités pour qu’elles s’auto-administrent à travers l’élection de conseillers régionaux et de maires par les populations elles-mêmes. Il n'y a pas de contradiction entre un mode de scrutin qui ferait de la région une circonscription pour les questions locales et de toute la nation une circonscription électorale pour ce qui concerne l’élection présidentielle.
Le Point Afrique : Ne sont-ce pas les atermoiements autour de cette question qui favorise finalement la corruption qui s'immisce dans les imperfections des institutions ?
Pascal Affi Nguessan : Non, la corruption, surtout au niveau électoral, est d’abord le fruit de la faiblesse de la maturité démocratique.
Le Point Afrique : C’est à dire ?
Pascal Affi Nguessan : La faiblesse de la maturité démocratique se concrétise par le fait qu’une bonne partie de la population n’a pas encore une conscience idéologique qui lui permette d’accorder d'abord de l’importance aux idées et aux programmes politiques plutôt qu’à un individu issu de son ethnie. C’est faute de cette prise de conscience qu’on peut sacrifier son avenir au profit de la satisfaction d’un besoin immédiat. La corruption est donc liée à la fois à l’ignorance mais aussi à la pauvreté extrême. Lorsqu'on est dans une situation de pauvreté extrême, on résiste difficilement à la tentation de prendre ce qui se présente à vous au détriment de l’avenir.
Le Point Afrique : Qu’est-ce que l'homme politique que vous êtes pense de la contradiction entre la dynamique d’intégration actuelle et le principe d l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation tel qu’érigé par l’ancêtre de l’Union africaine, l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) ?
Pascal Affi Nguessan : C'est une question qui est liée à l'histoire du monde. Le monde s'est construit dans un processus d'émergence des États-nations. Aujourd’hui, le monde est un monde d’États-nations
Cela ne se vérifie pas toujours. Dans certains cas, la nation est née au forceps et l'État n'est pas stable.
Oui, surtout en Afrique. Mais si nous regardons l’histoire d’un pays comme la France, on a commencé à construire la nation française autour de la Monarchie, d’abord une monarchie de droit divin. Celle-ci, plus tard, s'est détachée de Rome afin d'organiser sur son territoire sa religion, sa population et son développement.
Le Point Afrique : Comment l’Afrique doit-elle faire quand les nations sont éparpillées entre plusieurs pays ?
Pascal Affi Nguessan : L’Afrique, dans le sillage du monde occidental et à travers la colonisation, s’est aussi constituée sur ce même modèle. Donc, il faut un État qui rassemble des populations. Il se trouve que le processus qui s'est déroulé en Europe n'est pas encore arrivé à maturité en Afrique. Des pays comme la France se sont construits sur plusieurs siècles. La Côte d'Ivoire, en tant qu'État indépendant n’a que 60 ans. En 60 ans, on n’a pas encore eu le temps de construire une nation. Nous avons un État mais pas une nation soudée. Nous avons un État, un chef d'État, une armée, un drapeau, mais les populations n’ont pas encore pris conscience d’appartenir à une nation. Pas suffisamment en tout cas. Elles sont éclatées, partagées, écartelées entre l'allégeance à leur tribu et l’appartenance à la nation ivoirienne.
Le problème, c'est qu’en même temps que nous sommes en train de chercher à construire une nation, nous sommes dans un monde qui se globalise et où un certain nombre de problèmes ne sont plus de la responsabilité nationale mais dépendent d'une concertation internationale : le réchauffement climatique, l'économie qui n’a plus de frontières, l’émergence des nouvelles technologies de l’information, le développement du transport font que les questions d’ordre international deviennent de plus en plus nombreuses et ont besoin d'être prises en charge par une institution supranationale. Celle-ci, pour le moment, n’existe pas en dehors de l’ONU qui n’est pas un Gouvernement du monde.
La question qui se pose à l’Afrique est de savoir comment construire l’Union africaine. Comment s'insérer dans la globalisation alors qu’on n'est même pas encore un État-nation solide ? Est ce qu’il faut sauter le pas des Etats-nations pour aller à l'intégration africaine avec un seul président pour toute l’Afrique ? Est-ce que cela est politiquement possible ? Étant donné les spécificités des peuples africains, la diversité de l’Afrique, il faut partir des États, passer par la phase sous-régionale, avant d’arriver éventuellement à une confédération des États africains. Tout ça pour dire que je ne vois pas comment on peut réussir un programme d’intégration africaine en partant uniquement des populations prises dans leur village respectif.
Le Point Afrique : Pour revenir à la Côte d’Ivoire stricto sensu, serez-vous candidat en 2025 ? Quelle est selon vous la bonne durée mais aussi le nombre de fois utiles à un mandat présidentiel pour un pays comme la Côte d’Ivoire ?
Pascal Affi Nguessan : Évidemment à mon niveau personnel, je suis candidat. Mais je serai candidat à la candidature parce que la décision relève du Congrès du parti. Mais le moment venu, je lui soumettrai ma candidature et j’espère que les camarades continueront à me faire confiance, comme ils l’ont fait jusqu’à présent, pour porter le drapeau du parti à l'élection présidentielle de 2025.
Pour ce qui est de la durée optimale d’un mandat présidentiel, on ne peut réfléchir et évoluer que par tâtonnements. Actuellement, dans le monde, le mandat de 5 ans semble être la règle la plus partagée mais il y a des pays qui ont des mandats de 4 ans. Je pense aux pays anglophones comme le Ghana par exemple. En 5 ans, on peut faire beaucoup de choses et, en la matière, je pense que ce qui doit être plus pris en compte c'est l'efficacité qui doit résulter du fait que le mandat soit un élément d’incitation, de mobilisation. Parce qu'on sait que dans 5 ans on doit rendre compte, on va exploiter, rentabiliser le temps et surtout ne pas dormir sur ses lauriers.
Le Point Afrique : Combien de renouvellements ?
Pascal Affi Nguessan : Un seul ! Je pense qu'en même temps qu’il faut rechercher l’efficacité dans le temps du mandat, il faut rechercher l’efficacité dans le nombre de mandats car il y a le risque d’usure du pouvoir. Deux mandats de 5 ans, ça fait 10 ans. C’est suffisant ! Il faut pouvoir passer le relais de manière à ce qu'il y ait un renouvellement permanent de la classe politique. Parce que beaucoup de crises sont liées au fait que des personnes sont restées trop longtemps au pouvoir. Leur longévité a souvent généré des impatiences qui ont débouché sur des conflits. Donc, limiter les mandats me semble plus sage.
Le Point Afrique : Comment définiriez-vous votre Côte d'Ivoire idéale ?
Pascal Affi Nguessan : La Côte d'Ivoire idéale, ce serait une Côte d'Ivoire de la diversité, de la liberté et de la démocratie ; une Côte d'Ivoire de l'ouverture sur le monde, le monde africain d’abord, puis sur le monde tout court ; une Côte d'Ivoire de la fraternité. Je crois que c'est ce que l’histoire et la géographie nous imposent. La géographie fait de la Côte d’Ivoire un pays de convergence. Tous les peuples qui l’habitent aujourd'hui sont venus des quatre coins du territoire : de l’Est, avec la population Akan, du Nord, avec les populations Malinké et Sénoufo, de l’Ouest, avec les populations Krou. Ils se sont tous retrouvés-là ont décidé de vivre ensemble. Même s’ils ont été accompagnés par la colonisation, ils se sont donnés les moyens de construire une nation.
Junior Gnapié
Pascal Affi Nguessan : L’Afrique, dans le sillage du monde occidental et à travers la colonisation, s’est aussi constituée sur ce même modèle. Donc, il faut un État qui rassemble des populations. Il se trouve que le processus qui s'est déroulé en Europe n'est pas encore arrivé à maturité en Afrique. Des pays comme la France se sont construits sur plusieurs siècles. La Côte d'Ivoire, en tant qu'État indépendant n’a que 60 ans. En 60 ans, on n’a pas encore eu le temps de construire une nation. Nous avons un État mais pas une nation soudée. Nous avons un État, un chef d'État, une armée, un drapeau, mais les populations n’ont pas encore pris conscience d’appartenir à une nation. Pas suffisamment en tout cas. Elles sont éclatées, partagées, écartelées entre l'allégeance à leur tribu et l’appartenance à la nation ivoirienne.
Le problème, c'est qu’en même temps que nous sommes en train de chercher à construire une nation, nous sommes dans un monde qui se globalise et où un certain nombre de problèmes ne sont plus de la responsabilité nationale mais dépendent d'une concertation internationale : le réchauffement climatique, l'économie qui n’a plus de frontières, l’émergence des nouvelles technologies de l’information, le développement du transport font que les questions d’ordre international deviennent de plus en plus nombreuses et ont besoin d'être prises en charge par une institution supranationale. Celle-ci, pour le moment, n’existe pas en dehors de l’ONU qui n’est pas un Gouvernement du monde.
La question qui se pose à l’Afrique est de savoir comment construire l’Union africaine. Comment s'insérer dans la globalisation alors qu’on n'est même pas encore un État-nation solide ? Est ce qu’il faut sauter le pas des Etats-nations pour aller à l'intégration africaine avec un seul président pour toute l’Afrique ? Est-ce que cela est politiquement possible ? Étant donné les spécificités des peuples africains, la diversité de l’Afrique, il faut partir des États, passer par la phase sous-régionale, avant d’arriver éventuellement à une confédération des États africains. Tout ça pour dire que je ne vois pas comment on peut réussir un programme d’intégration africaine en partant uniquement des populations prises dans leur village respectif.
Le Point Afrique : Pour revenir à la Côte d’Ivoire stricto sensu, serez-vous candidat en 2025 ? Quelle est selon vous la bonne durée mais aussi le nombre de fois utiles à un mandat présidentiel pour un pays comme la Côte d’Ivoire ?
Pascal Affi Nguessan : Évidemment à mon niveau personnel, je suis candidat. Mais je serai candidat à la candidature parce que la décision relève du Congrès du parti. Mais le moment venu, je lui soumettrai ma candidature et j’espère que les camarades continueront à me faire confiance, comme ils l’ont fait jusqu’à présent, pour porter le drapeau du parti à l'élection présidentielle de 2025.
Pour ce qui est de la durée optimale d’un mandat présidentiel, on ne peut réfléchir et évoluer que par tâtonnements. Actuellement, dans le monde, le mandat de 5 ans semble être la règle la plus partagée mais il y a des pays qui ont des mandats de 4 ans. Je pense aux pays anglophones comme le Ghana par exemple. En 5 ans, on peut faire beaucoup de choses et, en la matière, je pense que ce qui doit être plus pris en compte c'est l'efficacité qui doit résulter du fait que le mandat soit un élément d’incitation, de mobilisation. Parce qu'on sait que dans 5 ans on doit rendre compte, on va exploiter, rentabiliser le temps et surtout ne pas dormir sur ses lauriers.
Le Point Afrique : Combien de renouvellements ?
Pascal Affi Nguessan : Un seul ! Je pense qu'en même temps qu’il faut rechercher l’efficacité dans le temps du mandat, il faut rechercher l’efficacité dans le nombre de mandats car il y a le risque d’usure du pouvoir. Deux mandats de 5 ans, ça fait 10 ans. C’est suffisant ! Il faut pouvoir passer le relais de manière à ce qu'il y ait un renouvellement permanent de la classe politique. Parce que beaucoup de crises sont liées au fait que des personnes sont restées trop longtemps au pouvoir. Leur longévité a souvent généré des impatiences qui ont débouché sur des conflits. Donc, limiter les mandats me semble plus sage.
Le Point Afrique : Comment définiriez-vous votre Côte d'Ivoire idéale ?
Pascal Affi Nguessan : La Côte d'Ivoire idéale, ce serait une Côte d'Ivoire de la diversité, de la liberté et de la démocratie ; une Côte d'Ivoire de l'ouverture sur le monde, le monde africain d’abord, puis sur le monde tout court ; une Côte d'Ivoire de la fraternité. Je crois que c'est ce que l’histoire et la géographie nous imposent. La géographie fait de la Côte d’Ivoire un pays de convergence. Tous les peuples qui l’habitent aujourd'hui sont venus des quatre coins du territoire : de l’Est, avec la population Akan, du Nord, avec les populations Malinké et Sénoufo, de l’Ouest, avec les populations Krou. Ils se sont tous retrouvés-là ont décidé de vivre ensemble. Même s’ils ont été accompagnés par la colonisation, ils se sont donnés les moyens de construire une nation.
Junior Gnapié